dimanche 31 octobre 2010


Pourquoi j’ai participé à la « provocation »


Par Michaël Ben-Ari (député à la Knesset du parti Ihoud Léoumi), paru dans l’hebdomadaire israélien Makor Rishon le 29.10.10

Traduit de l’hébreu par Méir Ben-Hayoun


C’est avec pas mal d’hésitation que j’ai décidé de me rendre mercredi 27 octobre pour la marche à Oum-El-Fahm. En effet, il était prévisible que les chevaliers de la liberté d’expression, les fervents partisans de la « gay parade » ou des « femmes du Kotel » nous attaqueraient sans vergogne et qualifieraient notre protestation de « provocation ». Il s’avère donc que pour ces gens, la droite n’a jamais le droit à la protestation. Selon eux, la « liberté d’expression » et la « démocratie » sont la propriété exclusive d’Oppenheimer* et consorts.


La presse comme à son accoutumée n’a pas déçu. Elle a dépeint les émeutiers arabes comme des « jeunes » et notre manifestation légale comme une « provocation de l’extrême droite ». Je me suis rendu à Oum-El-Fahm parce que je suis arrivé à la conclusion qu’il n’y avait pas d’autre moyen de tirer la sonnette d’alarme, de mettre en garde ceux qui ont pour habitude d’enfoncer la tête profondément dans la terre au moment même où devant eux surgit ce monstre nommé le « Mouvement islamique ».


Il y a six mois de cela, j’ai utilisé l’outil parlementaire appelé projet de loi pour proposer de déclarer illégal le Mouvement islamique. Je me suis retrouvé sur le podium de la Knesset à exposer aux députés l’idéologie et l’activité du Mouvement islamique qui est une branche des Frères musulmans. Il s’agit d’un courant islamiste qui veut mettre en vigueur dans le monde entier les lois de la Charia, comme le Hamas, comme le Hezbollah et comme Al Qaeda. Raed Salah est le moteur de ce mouvement. Il a déjà été coupable de transfert de fonds pour le Hamas et de connivence avec des éléments terroristes qui se nommaient les « libres de la Galilée ». Dans une série de quinze articles, on peut prendre connaissance de sa vision du Mouvement islamique, une idéologie où il désire voir l’islam régir tous les territoires du Califat musulman conquis par Mahomet et en ajouter d’autres. Il « prophétise » qu’en l’an 2050, la plus grande partie de l’Europe sera musulmane.


Ce Mouvement qui ne reconnait pas les institutions de l’Etat « sioniste » d’Israël s’évertue à mettre sur pied l’infrastructure humaine et idéologique du jour du soulèvement général, « le jourJ du Djihad ». Le Djihad avec les activités de charité est le programme d’action de ce Mouvement en vue de la prise du pouvoir à laquelle il aspire.


Raed Salah est une persona-non-gratta même en Jordanie. En Egypte, où on connait très bien le potentiel destructeur des Frères musulmans, ils sont tenus bien en laisse. Seulement chez nous, en Israël, l’équivalent du Hamas et d’Al Qaeda agit en toute liberté.


Le monde occidental a la fâcheuse tendance à être surpris par les offensives de l’islam fondamentaliste. Les lumières rouges d’alerte avant les attentats du 11 septembre 2001 aux Etats-Unis, avant les évènements d’octobre 2000 ici et avant la Flottille pour Gaza n’ont en rien perturbé le sommeil de ceux qui désirent se bercer d’illusions que tout va bien. En général, les dirigeants ne prévoient presque jamais les graves problèmes. Ils ont tendance à mésestimer l’ampleur de la catastrophe qui s’approche à grand pas. Pourquoi troubler la fête et l’atmosphère de « tous va pour le mieux dans le meilleur des mondes » ? En effet, si on ne s’introduit pas à Oum-El-Fahm, on ne s’exposera pas à l’embuscade que nous prépare Raed Salah. La Galilée est submergée d’activités à caractère terroriste, d’incidents violents, d’incendies, et de réseaux d’espionnage pour l’ennemi. Mais chez nous, on insiste à parler de phénomènes circonscrits et marginaux. On veut nous faire croire que les actes de violence sont à caractère de droits communs et non idéologiques, que les méfaits sont effectués en « état d’ivresse », pourvu qu’on n’appelle pas les choses par leurs noms.


Le jour où nous nous sommes rendus à Oum-El-Fahm, comme d’habitude, je suis sorti de chez moi de très bonne heure alors que tous étaient encore endormis. En telle circonstance, j’ai pour habitude de faire un tour entre mes enfants qui dorment profondément et de recouvrir celui dont la couverture a glissé. Ce matin-là, je me suis attardé un peu plus. J’ai regardé mes enfants et j’ai médité sur notre devoir envers eux, envers les enfants de nous tous. Ils ont le droit de bien dormir, mais nous, nous avons le devoir de faire en sorte qu’ils ne se réveillent pas dans un monde d’illusion brisée.


Ma proposition de loi contre le Mouvement islamique a été rejetée par une vaste majorité et n’a provoqué aucun bouleversement, ni même aucune attention dans le système politique et public. En revanche, notre protestation dans ce nid de frelons a attiré sur nous tout le lexique d’injures bien connues. Toutefois, pendant quelques heures, en Israël et dans le monde, tous ont eu leur attention attirée sur cette organisation dangereuse. Sur le chemin du retour, j’ai reçu un appel téléphonique d’un ancien haut responsable des Services de sécurité générale (Shabak) qui voulait m’exprimer son soutien et ses encouragements. « Député Ben-Ari » m’a-t-il dit après m’avoir écouté sur l’une des chaines radiophoniques, « vous avez raison. Le Mouvement islamique de Galilée est l’une des pièces du Djihad global mais l’Etat d’Israël craint se mesurer avec ». Il a ajouté : « vos messages sont très importants, Deux tiers du peuple sont avec vous. »


En fin de compte, notre petite action a provoqué certes des vagues contre nous, mais également en direction de cette dangereuse mouvance. Est-ce que cela enclenchera le changement d’attitude tant espéré ? L’avenir le dira. Je prie que nous ne nous réveillons pas un beau matin dans une intifada d’assassins shahids (martyres) induite par le Mouvement islamique qui nous « prendra de surprise », comme d’habitude, et fera couler des rivières de sang. Alors, on nous demandera de témoigner devant une commission d’enquête et de dire : « voilà, on vous avait bien prévenu. »


* Yariv Oppenheimer est le Secrétaire général du Mouvement Shalom Akhshav, la « paix maintenant ».