mardi 7 juillet 2009

Pourquoi Gilad Shalit ne revient pas à la maison


Pourquoi Gilad Shalit ne revient pas à la maison


Par Moshé Feiglin

Paru sur Aroutz 7 le 02/07/09, traduit de l'hébreu par Méir Ben-Hayoun

La pénible chronique des militaires israéliens capturés par les organisations terroristes n'a pas débuté avec Gilad Shalit. Exception faite d'Elhanan Tanenbaum qui pour des raisons encore obscures, le Premier Ministre Ariel Sharon a exercé des pressions très fortes sur son cabinet et s'est entêté à payer une rançon folle pour sa libération, on remarquera que la dernière fois où des soldats sont revenus en vie après un échange de prisonniers fut en 1985, dans la transaction avec Ahmed Djibril [6 militaires israéliens prisonniers au Liban furent échangés contre 1150 terroristes condamnés à des peines de prison très lourdes, dont Kozo Okamoto] .

La liste des otages israéliens rendus morts ou encore disparus est longue et pénible: Ron Arad; les combattants de Giv'ati Rahamim Alshikh et Yossi Fink; les trois captifs du Mont Dov: Omar Sa'ouad, Benny Avraham et Ady Avitan; Nissim Tolédano, Ilan Saadoun, Avi Sasportas, Yaron Hen, Arieh Frankental, Ehoud Goldvasser et Ohad Regev. A part Nahshon Waxman, le gouvernement d'Israel a tenté de les faire libérer par un échange de prisonniers dans la même modalité qu'aujourd'hui il tente de le faire face aux geôliers de Gilad Shalit. Aucun de ces militaires n'a eu le bonheur de revenir à la maison.

Jusqu'au maudit échange de prisonniers avec Ahmed Djibril, la politique d'Israel en telles circonstances était toute autre. L'option privilégiée était le raid militaire même si parfois il pouvait tragiquement échouer, comme lors des opérations de sauvetage ratées des enfants d'Avivim (1972) ou de Maalot (1974). Parfois, l'opération pouvait réussir comme à Entebbé (1976). En général, le gouvernement refusait de négocier avec les preneurs d'otages et s'il négociait, le prix à payer était raisonnable comme le recommandent les sources juives. Pour recevoir des cadavres, on rendait des cadavres.

On peut tout à fait affirmer que la transaction avec Djibril et la libération en série de terroristes qui s'en suivit fut le catalyseur principal du déclenchement de la première intifada (1987). Le nombre d'Israéliens qui furent assassinés directement par ces assassins libérés et indirectement par l'influx de motivation au terrorisme par la présence de centaines de terroristes dispersés sur le terrain est nettement supérieur au nombre de militaires que cela avait permis de faire libérer.

Paradoxalement, 24 ans après qu'il fut décidé de faire libérer "à tout prix" nos militaires faits otages il s'avère que nos différents gouvernements ne sont pas parvenus à faire libérer un seul d'entre eux. En revanche, 2000 de nos citoyens, hommes, femmes et enfants ont été assassinés cruellement depuis.

Bien entendu, le concept "à tout prix" induit la libération de tous les terroristes emprisonnés en Israel. Cela ne signifie pas initier une opération guerrière, parce que la guerre est une chose négative par essence. De sorte qu'en réalité, il ne s'agit pas réellement de libérer nos otages "à tout prix". On peut douter que l'intention des manifestants pour la libération de Gilad est d'inciter à bombarder massivement Gaza et d'encaisser les condamnations et les mises au ban internationales, jusqu'à ce que le Hamas à genou libérât Gilad. Même couper le courant électrique à la Bande de Gaza est un prix que le gouvernement d'Israel ne peut se permettre pour un seul de ses soldats pris en otage. Quand on dit "à tout prix", cela signifie tout prix pacifique qui satisfera Shelly Yehimovitz (ndlt: membre de la Knesset pour le parti travailliste et ex présentatrice d'une émission quotidienne radiophonique très populaire) et les Quatre mères (mouvement pacifiste de mères de militaires pour le retrait de Tsahal du Sud Liban jusqu'en l'an 2000) et qui fera reluire l'image médiatique des politiciens qui en prendront l'initiative.

Durant ces dernières 24 années, l'expérience démontre cruellement que ceux qui affirment qu'il faut libérer Gilad à tout prix, de facto, condamnent ce dernier à une mort certaine. Je ne souhaite rien de plus que de me tromper en affirmant cela. Mais la vraie signification de "à tout prix" est en fait qu'il n'y a "aucun prix". Les assassins ont bien compris qu'en attendant patiemment, ils ne peuvent qu'en sortir gagnants. Plus ils sont cruels, inhumains et, empêchent les visites de la croix rouge et même s'ils exécutent l'otage et négocient le retour de son cadavre, la rançon qu'ils obtiendront des Israéliens ne fera qu'augmenter.
D'autant plus que le prix que les Israéliens sont pas prêts à payer n'inclut pas la guerre. L'emprisonnement des terroristes (dans des conditions de maison de repos) ne perturbe pas l'ennemi outre mesure. La situation optimale de leur point de vue est la poursuite de la conjoncture actuelle, à savoir qu'Israel est humilié et craque de plus en plus. Si Gilad était relâché, cela cesserait, alors pourquoi libérer Gilad?

"Il n'y a rien qui vaille la peine de mourir" chante John Lenon. Cette approche s'est enracinée chez nous lors de la Première Guerre du Liban. La manifestation des 400 000 (un chiffre tout ce qu'il y a de plus fantaisiste) [après Sabra et Chatila en septembre 1982], les associations des mères et tout le courant de gauche qui a relevé la tête pendant cette guerre ont promu ces conceptions postmodernes selon lesquelles la guerre est le mal absolu et tout ce qu'il reste à faire est de penser dans un autre paradigme que celui des rapports de forces et les choses s'arrangeront d'elles-mêmes.

Le film d'animation d'Ari Folman 'Valse avec Bashir", qui est un très bon film décrivant l'expérience de cette guerre, fait passer précisément ce message. C'est une guerre absurde sans raison et sans but. J'étais jeune officier d'active alors et je peux dire que ce n'était pas la sensation des militaires qui y participaient. Il s'avère que, comme pour toutes les expériences traversées dans la vie, la guerre aussi est vue à travers les lunettes qu'on apporte de la maison.

Depuis la Guerre du Liban, la gauche à mis sur le nez du peuple d'Israel des lunettes à travers lesquelles la guerre est illégitime et condamnable en tout circonstance. A partir ce cet instant, préserver la vie des militaires est devenue une valeur suprême. Après l'échange avec Djibril, quand l'ennemi a compris cela, la chance de revoir vivant un otage israélien est devenue infime. Dès que le slogan "ramener nos soldats vivants à la maison" est devenu le mot d'ordre essentiel, aucun prisonnier israélien n'est revenu vivant.

Il s'est passé autre chose il y a exactement 24 ans. Le gouvernement d'Israel a trahi et a abandonné à la geôle américaine son agent de renseignement, Yehonatan Pollard. Une relation étroite lie la pleine coopération du gouvernement d'Israel avec l'administration américain dans l'emprisonnement de notre frère Yehonatan et notre incapacité à ramener nos prisonniers à la maison. Le peuple d'Israel constitue un seul corps, que ce soit sur la Terre d'Israel ou en dehors. Quand l'infection de la trahison touche une partie de ce corps, cela s'étend à tous les membres.

Par les renseignements qu'il nous a fournis, Yéhonatan Pollard nous a permis d'éliminer en 1981 la menace constituée par le programme nucléaire irakien. Pourquoi a-t-il fait cela? Parce que nous sommes Juifs comme lui. Mais nous l'avons trahi et lâché en pâture aux lourdauds du complexe américain de défense qui ne savent toujours pas identifier leurs véritables ennemis et se font toujours surprendre comme le 11 septembre. Nous avons préféré nous voir comme des Israéliens et voir en lui un traitre américain. Quand nous tournons le dos à notre identité juive, nous ne sommes plus capables d'être fidèles même à notre identité israélienne
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